Paris, la capitale de l’intelligence artificielle !

06/07/2024, classé dans

Depuis de nombreuses années, les Français estiment que leur pays connaît un réel déclin et que leur capitale est moins attractive. Ces jugements ne sont pas partagées par les étrangers. Ces derniers sont de plus en plus nombreux à venir en France que ce soit pour des voyages touristiques ou pour des voyages d’affaires. Les projets étrangers d’investissement sont en hausse. À l’occasion de la réunion « Choose France » au Château de Versailles, organisée au mois de mai dernier, les chefs d’entreprise étrangers présents ont promis de réaliser pour plus de 15 milliards d’euros d’investissement en France. En France, comme dans les autres pays, les résultats économiques ont peu d’influence électorale. Les électeurs perçoivent peu les améliorations économiques surtout quand elles font suite à des crises. L’épidémie de covid et la vague inflationniste ont marqué la population qui est peu sensible au regain d’attractivité du pays pour les investisseurs internationaux même si cela se traduit par des créations d’emplois.

Dans les années 1990 et 2000, la France était perçue comme un pays bureaucratique dont le poids des prélèvements pénalise les investissements. Paris était également jugée peu attractive en raison de ses embouteillages et du manque de dynamisme des autorités pour créer des évènements d’ampleur internationale. Sur le plan de la finance, la capitale avait été supplantée par Londres et Frankfort.

Paris, capitale du luxe

Au cours de la dernière décennie, Paris a regagné une grande partie du terrain perdu. Elle s’est imposée comme la capitale mondiale du luxe avec la présence de grands groupes de ce secteur (LVMH, Hermès, Kering, Chanel). Ces derniers y ont investi plusieurs milliards d’euros en restaurant ou en créant de nouvelles magasins. LVMH est désormais présent dans l’hôtellerie et la restauration. La Fashion week qui se tient plusieurs fois par an est devenue un rendez-vous incontournable générateur d’un chiffre d’affaires important.

Paris, place financière européenne

La France a également renforcé son rôle dans le domaine financier. Plus de 5 000 milliards d’euros d’actifs sont gérés par des établissements français, contre 3 800 milliards d’euros en 2015. Amundi, société française est devenue le plus grand gestionnaire de fonds d’Europe avec plus de 2 000 milliards d’euros d’actifs gérés, soit plus du double du chiffre enregistré dix ans plus tôt. Les grandes banques américaines ont décidé d’accroître leur présence à Paris, surtout après le Brexit. En 2021, JPMorgan Chase, la plus grande banque américaine, a choisi Paris pour installer sa principale salle des marchés européenne. Cette banque emploie au sein de la capitale plus de 1 000 personnes. Bank of America a multiplié par dix ses effectifs parisiens qui dépassent 700 personnes. Les effectifs de Citigroup sont passés de 170 à 400 personnes. Cette banque prévoit de créer, dans les prochains mois, plus de 200 emplois. Morgan Stanley a également doublé ses effectifs à Paris ces trois dernières années.

Paris à l’heure de l’intelligence artificielle

Emmanuel Macron a rêvé de faire de la France une startup nation. Si le pays ne concurrence pas les États-Unis ou Israël, il est néanmoins le premier en Europe continental pour les investissements en capital-risque dédiés à la haute technologie. Au premier trimestre de cette année, selon KPMG, plus de 1,5 milliard de dollars ont été investis  dans des startups installés à Paris. 500 millions de dollars ont été investis dans des entreprises travaillant sur l’intelligence artificielle. Leurs homologues de Londres, historiquement le premier pôle technologique d’Europe, n’ont attiré que 100 millions de dollars au cours de la même période. Seules les États-Unis et la Chine abritent un plus grand nombre de modèles d’apprentissage automatique selon un rapport de l’Université de Stanford. Sur les 100 startups à suivre ayant un capitalisation supérieure à un milliard de dollars en Europe, 21 sont françaises. Le Royaume-Uni en compte 22 et l’Allemagne 14. Un rapport  d’Accel, une société de capital-risque (VC), souligne que les anciens employés de 28 « licornes » en France ont créé 186 nouvelles startups, prouvant le dynamisme du secteur de la haute technologie. L’entreprise française « Mistral AI », à l’origine de modèles d’IA génératifs de pointe, est reconnue au niveau international. Au mois de juin 2024, cette startup a levé 600 millions d’euros lors d’un tour de table lui permettant d’être désormais valorisée à près de 6 milliards d’euros. En mai, la société française « H » spécialiste de de l’IA, anciennement connue sous le nom de « Holistic AO », a annoncé un tour de table de 220 millions de dollars quelques mois seulement après sa fondation par un chercheur français de l’Université de Stanford et quatre anciens employés de DeepMind, le laboratoire d’IA de Google. Le succès du digital en France est en partie la conséquence de l’engagement des pouvoirs publics. Dès 2017, les gouvernements ont compris le potentiel de l’IA et le rôle que Paris pourrait jouer dans le développement de cette technologie. Dès 2018, une stratégie nationale en matière d’IA a été élaborée par le mathématicien Cédric Villani. Cédric O, l’un des cofondateurs de Mistral, qui a été ministre du Numérique de M. Macron, affirme que la décision cruciale était de séduire les grandes entreprises technologiques américaines. « À l’époque, les gens disaient : vous êtes fous de dérouler le tapis rouge aux Américains ; ils vont voler votre talent. En fait, c’est le contraire qui s’est produit. De nombreux fondateurs parisiens de l’IA, dont le trio Mistral, ont quitté les centres de recherche américains pour créer leurs entreprise ».

Paris, une forte attractivité

Paris a bénéficié sans nul doute du Brexit. Les financiers ont préféré la capitale française à Frankfort, moins bien desservie. Charles de Gaulle est le deuxième aéroport européen après Londres. Le réseau ferroviaire français permet de se rendre en moins de trois heures à Londres ou à Bruxelles. La capitale parisienne demeure réputée pour sa qualité de vie. Le traitement fiscal préférentiel accordé par Emmanuel Macron aux étrangers pendant les premières années de leur résidence a contribué à renforcer l’attractivité de la ville-capitale. Paris peut également compter sur plusieurs établissements d’enseignement supérieurs de qualité. Deux des six cofondateurs de Mistral sont issus de l’École Polytechnique ; un troisième est diplômé de l’École Normale Supérieure. Ce vivier de talents a attiré les grandes entreprises américaines comme Google, Microsoft ou Meta, qui ont ouvert de grands laboratoires d’IA à Paris ou décidé d’y installer leur siège européen. La France dispose d’un réseau électrique nucléaire français de grande puissance pouvant, par ailleurs, alimenter les centres de données d’IA énergivores.

Après le départ du Royaume-Uni de l’Union européenne, plusieurs grandes villes se sont positionnées pour accueillir des antennes d’établissements financiers ayant fait le choix de quitter Londres. Amsterdam, Dublin et Francfort étaient sur les rangs. Le succès de Paris s’explique par la forte mobilisation de tous les pouvoirs publics. Le projet du Grand Paris avec la réalisation de plusieurs lignes de métro automatiques a également été perçu positivement par les investisseurs étrangers. Ces nouvelles lignes relieront les aéroports et plusieurs centres de recherche ainsi que le quartier d’affaires de la Défense. Depuis 2017, la stabilité fiscale a été également apprécié. Jusqu’à peu, la France était connue pour ses changements incessants en matière fiscale. En sept ans, les règles fiscales ont peu évolué. Par ailleurs, plusieurs impôts ont été réduits.

Le poids occupé par la France dans l’intelligence artificielle et notamment celui de Paris, n’est pas connu ni apprécié à juste mesure par l’opinion, la population française étant actuellement préoccupée par les questions de pouvoir d’achat et de sécurité. Il n’en demeure pas moins que la nouvelle majorité, quelle qu’elle soit, aura tout avantage à poursuivre le travail engagé depuis sept ans. Les emplois de demain dépendent la capacité de la France à se maintenir sur le secteur des hautes technologies. 

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