Ironie de l’histoire, les marchés financiers de plus en plus incontournables
L’air du temps n’est pas aux marchés financiers et pourtant, dans les prochains mois, l’avenir de nos entreprises et tout particulièrement de nos PME passera, pour leur financement, par les marchés actions et obligataire.
Les entreprises françaises, à la différence de leurs homologues anglaises ou américaines, se financent essentiellement en recourant aux crédits bancaires. Le financement par actions ou par émission d’obligations est réservé aux grandes entreprises. Cette situation souvent soulignée explique la nature conflictuelle des relations entre les PME et les banques.
Les entreprises françaises sont moins bien dotées en fonds propres que leurs concurrentes étrangères. Elles sont surtout moins bien dotées en ressources longues. L’ouverture du capital est toujours vécue comme une souffrance, comme une perte d’indépendance. L’ISF ne facilite pas même si cet impôt a été aménagé les ouvertures à des tiers du capital. Pour l’accès aux obligations, la complexité de l’accès est dissuasive.
Les entreprises françaises sont donc dépendantes des banques ; or il est ainsi évalué que chaque année, 10 % des entreprises françaises seraient rationnées en termes de crédit contre 2,5 % aux Etats-Unis.
Si les relations sont compliquées entre les banques et les PME, les torts ne sont pas à mettre exclusivement du côté des premières. En effet, les banques tentent de minimiser leurs expositions aux risques. Du fait d’une approche très comptable, la qualité de l’information dont elles disposent sur leurs entreprises clientes est moyenne. Par ailleurs, l’existence d’un taux réglementaire de l’usure, la France est avec l’Italie un des rares pays a conservé un tel taux, les banques ne peuvent pas établir un barème de taux en fonction des risques. Par commodité, leur politique est manichéenne. Le droit de la défaillance n’est guère favorable aux créanciers privés qui passent après les créanciers publics. En cas de faillite, les capacités de recouvrement sont faibles. Mais, le conservatisme des banques est liée à la faiblesse de la concurrence bancaire. La France possède de très grandes banques de taille systémique mais pour le financement des PME, il n’est pas certain que cela soit un avantage.
De ce fait, les entreprises françaises sont entravées dans leur développement. Pour se prémunir d’éventuels refus des banques, elles accumulent des liquidités. Selon une étude réalisée par les banques centrales allemande et française, le stock de liquidités serait deux fois plus important en France que de l’autre côté du Rhin (5 % du bilan contre 2 %).
Avec la crise des dettes publiques, avec la mise en œuvre des nouvelles règles prudentielles pour les banques et les compagnies d’assurances (Bâle III et Solvency II), le mode de financement de l’économie productive risque d’être fortement impacté.
La nécessaire augmentation des fonds propres des banques entraînera une réduction des crédits à long terme à destination des entreprises et des collectivités locales.
Le financement en zone euro sera plus désintermédié. Les Etats se tourneront plus vers les compagnies d’assurances, les fonds de pension et les fonds souverains. Les entreprises européennes et françaises plus particulièrement devront trouver leurs ressources sur les marchés obligataires et actions. Si pour les grandes entreprises, cette évolution ne sera pas une révolution, il en est tout autre pour les PME. En effet, l’accès aux marchés financiers n’est pas naturel pour les PME. Il n’y a pas beaucoup de structures qui jouent le rôle d’intermédiaire. Le capital risque est deux à trois fois plus faible en France qu’aux Etats-Unis. L’absence de fonds de pension a empêché la création d’équipes spécialisées dans le suivi des PME.
Face au durcissement des conditions d’octroi des crédits, l’épargne des Français devra être orientée vers des placements longs. Une telle réorientation ne s’effectuera pas obligatoirement au détriment des épargnants ; en effet avec la baisse du rendement des fonds euros des contrats d’assurance-vie, la faible rémunération des comptes sur livret (hors période de promotion), le placement « actions » et celui des obligations d’entreprise n’est certes pas sans risques mais sans nul doute le plus attractif. En matière obligataire, l’accès des PME groupé devrait limiter les risques et faciliter leur accès à ce marché. Il y a sans nul doute de nouveaux véhicules financiers à inventer afin de permettre la mutation du mode de financement de l’économie.
Partagez