Elections européennes, what’s else ?
L’UMP avec 28 % sort vainqueur des élections. Cette victoire ou plutôt l’impression de victoire est liée à la faiblesse de ses concurrents et du fait que le parti majoritaire soit arrivé en tête avec plus de 12 points d’avance sur le second.
Dans les faits, l’UMP a 28 % des 40 % de votants. Elle ne dispose que de peu de réserves de voix. Néanmoins, par son avance et la marginalisation de ses adversaires, elle est renforcée. C’est en outre la première fois depuis sa création e 2002 que l’UMP gagne une élection intermédiaire. L’UMP a gagné les deux élections présidentielles et les deux élections législatives mais n’avaient jamais gagné d’élections locales ou européennes. Elle a vaincu ce signe indien d’autant plus que la cote de popularité du Président de la République n’est pas très élevée. Elle a gagné sur sa capacité à mobiliser son électorat et grâce aux erreurs de ses concurrents.
L »UMP s’est conduit en leader durant la campagne en imposant le rythme ou plutôt l’absence de rythme et les thèmes (la Turquie, l’immigration, la sécurité, le bilan du Président de la République durant la présidence française de l’Union). L’UMP n’a pas essayé de sortir de son espace de conquérir des nouvelles parts de marché.
Le PS, avec 16,5 % des voix, réalise un score rappelant celui de Rocard en 1994, Bernard Tapis jouant alors le rôle de Daniel Cohn Bendit. Le Parti socialiste, principal parti d’opposition, a été incapable de se créer un espace tant il est divisé sur le plan européen qu’au niveau de son organisation. Empêtré dans ses contradictions, l’anti-sarkozysme est apparu bien insuffisant pour capter l’électorat de gauche. Dans ce domaine, la concurrence était élevée. Le PS est une vieille marque sans stratégie et sans projet. Ségolène Royal sort vainqueur de ces élections du fait de sa faible implication. En cas de réélection en 2010 à tête de la région Poitou Charente, elle sera en position de force pour l’investiture pour l’élection présidentielle de 2012.
Les écologistes avec 16,3 % ont remporté un succès qui n’en demeure pas moins fragile. En effet, ils ont été portés par un symbole, un mythe qui alternativement se présente en France et en Allemagne, Daniel Cohn Bendit. Mais le leader n’a pas l’intention de poursuivre le combat sur le terrain national. Citoyen allemand, il ne veut pas prendre la nationalité française pour se présenter à une élection présidentielle. Privés de leur mythe, les écologistes sont nus, sans chef, sans stratégie… Tout aussi divisés que les socialistes, ils peuvent rapidement retourner à des scores à un chiffre. Si l’on ajoute les divers écolos, ce courant a obtenu plus de 22 % des voix. Le défi sera de capitaliser ce succès et d’éviter que ce soit un feu de paille.
L’échec du Modem est un cas d’école. François Bayrou est un homme profondément de droite, un terrien, un paysan qui est convaincu d’être l’héritier d’Henri IV. Depuis 1998, il essaie de bâtir un parti se situant au centre. Le résultat a été un isolement croissant que les résultats de l’élection présidentielle de 2007 ont un temps masqué. En s’opposant de plus en plus durement à Nicolas Sarkozy en critiquant son américanisme et son culte de la personnalité, il a transformé le Modem en parti populiste. Issu de la démocratie chrétienne, François Bayrou est assez mal placé pour critiquer le rapprochement avec les Etats-Unis ou le retour de la France dans le commandement militaire de l’OTAN. De même, dirigeant son parti de manière autoritaire et n’ayant de cesse de se mettre en avant, il lui est difficile de critiquer Nicolas Sarkozy sur ce terrain. François Bayrou a été enivré par le succès de son dernier livre ; or les succès littéraires ne font pas les succès électoraux.
Tout en ayant refusé de sceller une alliance avec le PS en laissant au pas de son immeuble Ségolène Royal entre les deux tours de la présidentielle de 2007, François Bayrou est tenté de jouer à gauche sachant que sa porte de sortie se trouve de ce coté là. Son refus s’explique par la déception de ne pas être au second tour et par l’espoir de voir le PS passer derrière le Modem. La grenouille qui se prend pour le bœuf a du accepter une série de défaites électorales depuis 2007. Le PS sait rebondir, il l’a prouvé en 1997 quatre ans après avoir sombré aux élections législatives de 1993, moins de 60 députés contre plus de 250 en 1988. De même, après 2002, il a réussi à gagner toutes les élections locales. Autre erreur de François Bayrou : s’attaquer au mythe Cohn Bendit. François Bayrou, depuis trois ans drague les bobos or en s’attaquant au héros de 1968, il s’attaque au père fondateur du boboïsme. Pas crédible à gauche, pas crédible auprès des bobos, il lui reste un plancher de voix issues en grande partie de la démocratie chrétienne.
L’extrême droite et souverainiste réalise un peu plus de 10 % (FN et Libertas). A bout de souffle, souffrant d’un manque de renouvellement au niveau des hommes et des femmes ainsi qu’au niveau des idées, l’extrême droite n’a pas disparu, loin de là, mais n’arrive pas à s’exprimer à l’occasion des élections.
L’extrême gauche (Front de gauche et NPA) totalise 12 % ce qui est loin d’être négligeable mais compte tenu des circonstances, ce résultat apparaît comme décevant. Pour une élection sans enjeu, elle pouvait prétendre à un meilleur résultat en particulier pour le NPA qui ne totalise que 6,1 %.
Les pro-européens ont obtenu près de 70 % des voix ce qui est en contradiction par rapport au référendum de 2005. Ce résultat est ambigu du fait que les écologistes comprenaient tout à la fois des pros et des anti-Traité constitutionnel.
Les forces réellement anti-libérales (au sens européen du terme) ont atteint à peine 25 %.
Le paysage politique est tout à la fois dominé par l’UMP et éclaté du fait d’un grand nombre de protagoniste. L’UMP devra confirmer sa capacité, l’année prochaine, de gagner des élections intermédiaires. Pour l’élection présidentielle de 2012, tout le défi de Nicolas Sarkozy, s’il se représente, sera d’arriver suffisamment en tête afin de créer un élan au second tour compte tenu que ses réserves de voix seront faibles. Il faudra qu’il favorise la division de ses adversaires, divisions internes et externes. Pour le moment, c’est un sans faute.
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