D’août 1971 à août 2011, de la fin de la convertibilité du dollar en or à la crise des dettes souveraines
Depuis la fin du mois de juillet, les places boursières ont perdu entre 15 et 20 % de leur valeur. Le plan de sauvetage grec comme les annonces des gouvernements et des banques centrales n’arrivent pas à endiguer le processus de dépréciation des actifs.
Les pouvoirs publics n’arrivent pas à reprendre la main sur cette crise qui prend les formes d’un krach boursier estival. Quelles sont les causes de cette incapacité à inverser la tendance.
Les pouvoirs publics en mal de bonne gouvernance
La crise est née d’un problème de gouvernance de part et d’autre de l’atlantique. Aux Etats-Unis, l’absence de consensus pour présenter un plan crédible d’assainissement des comptes publics a, en grande partie, justifié la décision de Standard and Poor’s d’abaisser la note américaine.
En Europe, le plan du 21 juillet a été arraché après de dures négociations et il n’entrera en vigueur qu’après de longues discussions parlementaires. L’Europe gère les crises au fil de l’eau. Le Fonds européen de stabilisation financières est insuffisamment doté (440 milliards d’euros réellement disponible quand la dette italienne s’élève à plus de 2000 milliards d’euros).
Les interventions de la Banque centrale européenne à travers les achats de titres espagnols et italiens prouvent la réalité du problème dans ces deux pays ; or ses interventions font l’objet de critiques de la part de l’Allemagne et trouveront rapidement leurs limites.
La Banque centrale américaine a réussi circonvenir l’incendie mais sans l’éteindre en promettant de maintenir des taux bas jusqu’à mi-2013. Un tel engagement est sans précédent et constitue un aveu de faiblesse. Il est le signe évident de l’attente d’un ralentissement économique et de l’épuisement des autres instruments de la politique économique. L’argent à taux zéro, déjà responsable des subprimes, ne saurait résoudre la crise. Tout comme le quantitative easing, il soulage sans guérir.
Les politiques non-coopératives en Europe comme aux Etats-Unis prennent le dessus. Quarante ans après l’annonce par Richard Nixon de la fin de convertibilité du dollar avec l’or, le 15 août 1971, la fuite en avant s’impose de plus en plus.
Les investisseurs semblent attendre des initiatives plus fortes que les annonces de rigueur budgétaire. Il y a une demande de coordination et de règlement structurel des dettes (régulation financière, eurobonds…) en lieu et place d’une politique au fil de l’eau.
Le ralentissement voire la récession est de plus en plus anticipé
Les résultats du second trimestre démontrent un net ralentissement au sein de la zone euro comme aux Etats-Unis. L’accumulation des plans de rigueur accroît cette tendance récessionniste d’autant plus qu’aucun gisement de croissance n’apparaît. Les investisseurs recherchent donc la sécurité et désinvestissent donc du marché actions. Un cercle vicieux risque de s’engager avec le ralentissement économique qui diminue les recettes des Etats et augmente les dépenses sociales.
Les derniers résultats français, chômage, production industrielle, consommation, prouvent également que le ralentissement économique est malheureusement bien engagé.
Les outils classiques de l’économie ont été utilisés et sont usés : relance keynésienne, taux d’intérêt faible… Il n’y a plus de marges pour de nouveaux plans de relance. Au contraire, l’exigence d’assainissement des comptes publics accentuera le ralentissement ce qui incite les investisseurs à sortir du marché actions.
La fragilité du système bancaire et financier amplifie le mouvement de baisse
La crise de 2008/2009 était avant tout financière. Les premiers plans mis en œuvre par les Etats avaient pour objectifs de sauver la sphère financière de l’implosion. Et d’assurer le fonctionnement du marché interbancaire. Après plus d’une semaine de baisse des cours, le secteur financier commence à être de nouveau sous tension. Le développement d’une méfiance généralisée serait pour la croissance fatale d’autant plus que les Etats ne pourraient pas rejouer leur rôle de garant de dernier ressort.
En outre, la diminution des valeurs boursières diminue les fonds des établissements financiers soumis à des contraintes prudentielles renforcées depuis la crise de 2008. Cette situation devrait conduire à un resserrement de la politique du crédit et a dégradé leur résultat.
Un impact direct pour les épargnants français limité pour le moment
Le patrimoine des Français est évalué à plus de 10 000 milliards d’euros. Le patrimoine financier et plus modeste ; il s’élève à 3250 milliards d’euros. La part principale du patrimoine est constituée de biens immobiliers.
En ce qui concerne la partie financière, les actions cotées représentent environ 500 milliards d’euros dont une grande partie est logée dans des OPCVM (SICAV, FCP) et dans les unités de compte des contrats d’assurance-vie (250 milliards d’euros sur un encours total de 1400 milliards d’euros).
85 % des contrats d’assurance-vie sont investis en fonds euros et bénéficie, à ce titre, d’une garantie en capital de la part des compagnies d’assurances. Les livrets A, les comptes sur livret, les plans d’épargne logement bénéficient d’une garantie en capital. La rémunération de ces placements dépend des taux d’intérêt et de l’inflation. Les taux d’intérêt sont actuellement stables notamment du fait que la France soit notée triple A.
La France compterait 4,2 millions d’actionnaires contre plus de 6 millions en 2008.
De ce fait, le nombre de Français réellement impactés par la crise est modeste d’autant plus que la perte n’est réalisée qu’au moment de la vente.
Les actions sont majoritairement détenues par les investisseurs institutionnels (assurances, fonds de pension et fonds souverains dont les actifs dépassent 54 000 milliards de dollars. Néanmoins, une dépréciation des actifs a des incidences sur le montant des pensions servies, sur les rendements des produits d’épargne ou sur la capacité d’investissement des fonds. Donc indirectement, nous sommes impactés par une dépréciation des actifs qui traduit en outre des anticipations d’un futur ralentissement économique.
En cas de faillite d’une banque (il faut souligner que la situation financière des banques françaises figure parmi les meilleures en Europe), le Fonds de garantie de dépôt indemnise les particuliers dans la limite de 100 000 euros. Cette garantie couvre les comptes courants et les comptes sur livrets (plan d’épargne logement compris). Par ailleurs, les comptes titres bénéficient d’une garantie de 70 000 euros tout comme les contrats d’assurance-vie. Ces garanties ne présagent pas d’éventuelles décisions qui pourraient être prises par les pouvoirs publics pour améliorer l’indemnisation des clients.
Les conséquences à terme
Le ralentissement économique
Le ralentissement économique devrait se concrétiser par le prolongement de la dégradation du chômage constatée depuis deux mois.
La croissance qui était sur une tendance de 2 % risque de tendre vers 1 % assez rapidement avec comme conséquence une augmentation du chômage.
Un durcissement de la politique fiscal
Les Français doivent s’attendre à la mise en œuvre de mesures d’assainissement qui seront d’autant plus difficiles que le ralentissement économique sera fort. Les risques d’augmentation des impôts (au-delà de l’action sur les niches fiscales) sont importants (après l’élection présidentielle si on peut tenir jusqu’au mois de mai 2012). La pression pour un relèvement de la CSG et ou de la TVA est évidente.
Un pouvoir d’achat incertain
Depuis le début de l’année, le pouvoir d’achat des Français a diminué du fait de l’augmentation des prix des matières premières et de l’énergie.
Dans les prochaines semaines, une détente est attendue sur les matières premières. La baisse du cours du pétrole devrait se prolonger d’autant plus si l’euro s’apprécie par rapport au dollar (la gestion de la crise par l’Europe pourrait infléchir la donne en cas de mésentente entre la France et l’Allemagne). Cette baisse sera d’autant plus nette si l’Asie et la Chine sont impactés (secteur financier et exportations).
En revanche, les prélèvements fiscaux et sociaux devraient ponctionner les revenus. Les majorations salariales seront plus faibles ainsi que les revenus issus du patrimoine.
L’immobilier marche sur une crête incertaine
Les prix de l’immobilier ont beaucoup augmenté, surtout dans les grandes villes, depuis la fin de la récession en 2009 (plus de 17 % à Paris). L’immobilier a constitué une valeur refuge en ces temps de crise. Il faut attirer l’attention sur le fait que l’immobilier connaît des cycles. Entre 1992 et 1997, les prix avaient baissé de 30 à 40 % dans certaines régions. Par ailleurs, plus le prix d’achat est important, plus le rendement risque d’être faible. Le rendement locatif tourne autour de 2 à 3 % avant impôt.
Depuis quelques semaines, une inflexion sur le marché est constatée avec un ralentissement du nombre de transactions et un allongement des délais de vente. Le resserrement des conditions de crédit ainsi que les menaces sur le pouvoir d’achat pourraient générer un processus de baisse. Le marché est jugé surévalué de 20 à 30 %
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