Qui en dernier ressort paiera ?

17/10/2020, classé dans

L’envolée des déficits et de l’endettement, en terres inconnues, sera pris en charge à un moment donné par les citoyens, d’une manière ou d’une autre.

Face à un déficit public et une augmentation, par ricochet, de l’endettement public, à un moment ou un autre, un processus de taxation doit intervenir, sous forme d’inflation ou de prélèvements. Les épargnants sont souvent aux avants postes.

La taxe inflationniste est de plusieurs natures. Elle peut concerner les prix des biens, du travail. Elle réduit le montant à rembourser. L’inflation est un facteur d’appauvrissement si les rémunérations, salaires, honoraires, dividendes, prestations sociales, ne sont pas indexés. La taxe inflationniste s’applique également à la valeur des actifs. L’augmentation des prix de l’immobilier et des actions est une taxation indirecte des jeunes générations si de même leurs rémunérations n’est pas corrélée. Un endettement croissant associé à des faibles taux d’intérêt entraîne une progression du prix de l’immobilier. Depuis plus de vingt ans, celui-ci augmente plus vite que les salaires, ce qui limite les possibilités d’accession à la propriété. Il en résulte un appauvrissement relatif.

La hausse des prélèvements

L’augmentation des prélèvements obligatoires est la solution la plus simple pour rétablir la solvabilité budgétaire des États. La hausse de la pression fiscale vise à faire apparaître un excédent budgétaire primaire. Celui-ci permet de contenir et de réduite la dette. Cette voie a été utilisée après la crise des subprimes dans la zone euro. De 2010 à 2019, le taux de prélèvements obligatoires est passé de 38 à 40,6 % du PIB, le solde primaire du budget (solde avant imputation du service de la dette) passant de -3,5 à +1 % du PIB. Cette solution est aujourd’hui récusée en raison de ses effets économiques et sociaux. La zone euro a connu une très faible croissance depuis la crise des subprimes en raison de la mise en œuvre de politiques budgétaires restrictives. Celles-ci peuvent également passer par la diminution des dépenses publiques, essentiellement sociales. Cette solution a également des effets économiques importants en réduisant la consommation. La France l’a peu pratiquée à la différence de l’Allemagne et des États d’Europe du Nord.

La taxe inflationniste

Avec la multiplication par plus de dix de la masse monétaire au sein de l’OCDE, la résurgence est annoncée régulièrement sans jamais se produire. Avec des dettes publiques qui dépassent 100 % du PIB, l’augmentation des prix est souhaitée afin d’en effacer une partie.

La dernière fois qu’on a vu une taxe inflationniste significative dans les pays de l’OCDE, c’est à la fin des années 1970 et au début des années 1980. Le taux d’inflation atteignait alors plus de 10 % par an avant de revenir autour de 2 % au milieu des années 1990.

La corrélation entre masse monétaire et inflation est, pour le moment, absente. Seuls les prix des actifs (actions et immobiliers) augmentent, ce qui n’est pas sans effet sur la répartition des richesses au sein des populations. La concurrence accrue générée par la montée du commerce en ligne, les plateformes de services et la mondialisation pèse sur les prix des biens et services. La tertiarisation des activités avec le recours croissant aux micro-entrepreneurs a modifié les processus de négociation des revalorisations des salaires. Enfin, une partie des actifs monétaires sont stérilisés pour raisons prudentielles par le secteur financier ou par précaution par les agents économiques, entreprises ou ménages.

La taxation des épargnants

La taxation des épargnants s’effectue par l’application de taux d’intérêt à long terme inférieur à la croissance nominale qui sont même dans certains cas négatifs. En 1996, le rendement moyen des emprunts d’État au sein de l’OCDE à 10 ans était de 6 %. Il est nul en 2020.

Les taux d’intérêt négatifs constituent une forme de taxe visant à corriger la valorisation des actifs. Les deux phénomènes sont intimement liés. La valorisation des actifs permet d’augmenter la quantité totale de monnaie et de monétiser la dette publique, les ratios restant constants entre les différents placements. Les autorités monétaires distinguent de plus en plus la monnaie de transaction et celle de placement. Les deux monnaies évolueraient dans des sphères autonomes.

Les épargnants investissant dans les produits de taux subissent la baisse du rendement sans bénéficier de la valorisation du capital. Ils sont donc perdants.  

Les prochaines années devraient donc aboutir à une pénalisation des épargnants investis en produits de taux, les salariés sous forme d’une moindre augmentation des salaires et les contribuables qui devraient à la fois acquitter plus d’impôts et subir une érosion des prestations. Le maintien des taux bas sur longue période aboutira à une taxation indirecte des jeunes générations qui devront faire face à une accumulation de dettes publiques et à une appréciation du prix des actifs.

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