septembre 2006 : comment réformer ?

21/07/2006, classé dans

L’échec du CPE n’a pas sonné le glas des réformes. Il a simplement prouvé que pour moderniser nos structures, il y avait des conditions préalables à respecter. La réforme n’est pas en soi légitime, elle ne saurait se résumer à une vérité technico-administrative qui s’impose du sommet à la base.

Contrairement à de nombreuses idées reçues, la réforme est possible dans notre pays. Depuis 2002, nous, les députés et les sénateurs, membres du Groupe des Réformateurs nous l’avons prouvée. C’est par notre action, que la législation sur les 35 heures a été assouplie ; c’est à notre initiative que plusieurs dispositions concernant le développement des PME ont été adoptées ; c’est aussi les Réformateurs qui ont obtenu que la loi Fillon comporte un volet en faveur de l’épargne retraite. Ces dispositions dont certaines ne sont pas sans importance, n’ont pas donné lieu à des manifestations ou à des contestations ; elles bénéficient même, pour la plupart d’entre-elles, d’un consensus dans l’opinion publique.

La réforme est possible, mais elle est surtout indispensable. Ce n’est pas une antienne, un slogan que nous répétons pour le plaisir. Nous sommes, en effet, convaincus qu’il est urgent, pour notre pays, d’arrêter de vivre au passé afin d’épouser le XXIeme siècle. La France doit cesser d’avoir peur de la mondialisation. Il n’y a pas, d’alternative, il n’y a pas de plan B, si ce n’est celui du déclin irrémédiable. Tous les Etats occidentaux ont entrepris, ces dernières années, de s’adapter à la nouvelle donne mondiale qui se caractérise notamment par le développement, à très grande vitesse, de pays comme la Chine ou l’Inde. Les Etats-Unis, le Royaume-Uni, les pays scandinaves ont pris le parti de la mondialisation. La France hésite, sur la voie à suivre. D’un côté, il y a les partisans de la rupture, du repli sur soi, du protectionnisme, du refus de la mondialisation, de la croyance en un autre modèle élaboré sur les restes peu glorieux du communisme et du socialisme ; de l’autre, il y a les tenants du ni-ni ; ni mondialisation, ni socialisme ; ce sont les tenants du statu quo. Cette politique, a minima, appliquée depuis un quart de siècle a pour conséquences un faible taux de croissance, un fort taux de chômage et un endettement public explosif.

La troisième voie que nous préconisons, a pour objectif de tirer tous les avantages de la mondialisation, de spécialiser notre pays sur les créneaux porteurs lui permettant de maintenir un haut niveau de protection sociale et de réduire réellement son chômage. Pour cela, nous devons accepter la refondation de nos structures collectives afin de créer un environnement favorable à une croissance forte et pérenne.

Pour jouer gagnant, quatre grands chantiers sont incontournables.

- La réforme fiscale

Des prélèvements supérieurs à 3 à 4 points de PIB par rapport à la moyenne européenne ne sont pas une fatalité. Il est possible de les réduite tout en améliorant le service rendu aux contribuables. L’investissement, sous toutes ses formes, doit être encouragé ; les talents, les innovateurs doivent être incités à venir s’installer en France et non chercher, comme aujourd’hui, à émigrer aux Etats-Unis, au Royaume-Uni ou en Belgique.

• La réforme de l’Etat

La réforme de l’Etat ne saurait se limiter à un discours de façade, à quelques incantations ou à l’unique question du non-renouvellement des départs à la retraite. Avant tout, il faut se poser la question des frontières de l’Etat. Une fois les activités de l’Etat cartographiées en fonction de leur caractère régalien ou non, il sera possible de réorganiser les services administratifs, de créer des agences autonomes ou de confier au privé ce qui n’est pas de la responsabilité publique.

• La réforme de la protection sociale

Avec plus de un million de Rmistes, avec plusieurs millions de personnes soumis aux minima sociaux, avec des déficits récurrents et croissants, notre système de protection sociale est menacé d’implosion. Surtout, il a échoué. Depuis trente ans, il n’a réussi ni à endiguer la montée du chômage, ni celle de la nouvelle pauvreté ou de l’exclusion. Il ne contribue plus à corriger les inégalités, à corriger les revers de la vie, il génère de l’assistanat. La responsabilisation des acteurs comme des bénéficiaires constitue une obligation tout comme l’instauration de relations plus individualisées entre les bénéficiaires de l’aide publique et les personnes qui en ont la charge.

• La réforme de la recherche et de l’enseignement supérieur

La France ne s’en sortira que par le haut. Il est vain de vouloir concurrencer des pays ayant des coûts de production dix, quinze ou vingt fois moins élevés que les nôtres. Notre matière première c’est l’intelligence, c’est notre capacité à innover, à inventer. Or, la recherche est un des maillons faibles de notre pays. Il faudrait au minimum y consacrer un point de PIB supplémentaire. A cette fin, nous proposons que toutes les dépenses de recherche ouvrent droit à un crédit d’impôt sans plafonnement. La bataille de la recherche exige également une plus grande autonomie des établissements d’enseignement supérieur qui, aujourd’hui, gérés de manière centralisée sont distancées au niveau mondial et sont incapables faute de moyens, faute de souplesse de former les étudiants tout en menant des travaux de recherche de haut niveau.

Pour un pacte de rupture mis en œuvre juste après les élections de 2007

Chez tous nos partenaires, les grandes mesures de modernisation ont été élaborées et appliquées en début de mandature lorsque le pouvoir dispose d’une forte légitimité. La réforme au fil de l’eau a vécu. La politique des petits pas, des demi-mesures, de l’adaptation douce n’est plus appropriée. Privatiser Renault sur 10 ans ou France Telecom sur vingt ans, c’était encore possible en 1986 ; c’est impossible aujourd’hui. C’est pourquoi le tempo de la réforme se devra d’être allegro et forte dès les premiers jours du nouveau mandat présidentiel.

Les deux préalables pour engager des réformes :

• Redonner toute sa place au Parlement
• Créer un espace de la négociation et du contrat

Pour un nouvel équilibre des pouvoirs

La réforme réussie ne peut pas être celle initiée et mise en œuvre de A à Z par le seul exécutif Pour porter le changement, le pays a besoin de refonder ses institutions. Nous n’appelons pas, de nos vœux, au grand soir constitutionnel mais force qu’il est plus que temps de corriger certains travers institutionnels renforcés par l’instauration du quinquennat.

La démocratie française se résume trop souvent à un face-à-face stérile entre l’exécutif et l’opinion publique. Ne pouvant ou refusant de s’appuyer sur un Parlement autonome, le gouvernement doté pourtant de grands pouvoirs, est bien souvent paralysé face aux mouvements de l’opinion publique. Dans un monde en profonde mutation, un Parlement fort, reconnu, représentatif, lieu de débats, lieu de propositions peut être un creuset pour des réformes durables et consensuelles. Pour cela, l’Assemblée nationale comme le Sénat doivent retrouver la maîtrise de leur ordre du jour. Ils doivent fixer leur calendrier de travail. Ils doivent, de manière indépendante, pouvoir élaborer des propositions de loi, suivre leur application et contrôler l’efficience des pouvoirs publics.

Pour un espace de la négociation

Dans une démocratie moderne, il est sain que l’exécutif négocie avec la représentation nationale, tout comme il est sain qu’il négocie avec des partenaires sociaux représentatifs et responsables. Surtout, il est incontournable que ces derniers discutent, élaborent et adoptent entre eux, de manière autonome, des accords ou des conventions régissant la vie des salariés et des entreprises qu’ils représentent.

Aujourd’hui, pourquoi les partenaires sociaux négocieraient-ils car de toute façon c’est l’Etat qui décide de tout et édicte toutes les normes de la vie sociale et économique ? Comment avoir des partenaires responsables avec un Etat qui ne respecte pas sa parole en revenant en permanence sur des dispositions fraîchement adoptées ? N’en fut-il pas ainsi avec la loi Aubry II qui remettait en cause Aubry I et les accords signés par les partenaires sociaux ? Les syndicats n’ont que la parole et la rue pour infléchir le cours des relations sociales. Il faut changer cette situation en reconnaissant constitutionnellement, comme le sont les domaines de la loi et du règlement, le domaine dévolu à la négociation. La représentativité des syndicats doit être également améliorée afin qu’ils puissent être de véritables acteurs responsables.

Les partenaires sociaux au niveau de l’entreprise, de la branche sont bien souvent mieux placés que le législateur, que le gouvernement pour appréhender la situation, les besoins des salariés, des entreprises. Le législateur n’a pas vocation à tout régir. Chez nos principaux partenaires, la concertation, le dialogue social, les accords ne sont pas de vains mots.

Nous ne pouvons pas nous permettre que 2007 soit un nouveau rendez-vous manqué pour la France et les Français. C’est pourquoi nous sommes favorables à l’adoption d’un pacte de rupture négocié sur des bases claires au Parlement mais aussi avec les partenaires sociaux. Le temps n’est plus aux réformes masquées ; le temps est au courage et à l’affirmation de valeurs audacieuses. C’est au nom de ces convictions que nous entendons porter l’esprit de réformes que nous avons initié depuis 2002.

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