Lettre à mes amis libéraux qui aiment le piratage sur Internet

10/04/2009, classé dans

Lettre aux amis libéraux opposés à la loi contre le piratage sur Internet

Au nom de la liberté, des libéraux condamnent avec véhémence la loi Hadopi de Christine Albanel qui prévoit des sanctions contre les Internautes pratiquant des téléchargements illégaux.

Bien évidemment, obtenir gratuitement de la musique, de l’information, des données est plus agréable que de devoir les payer.

Bien évidemment qui n’a pas ou n’a pas été tenté de voler des cd ou des livres….

Mais, au-delà de la démagogie, au-delà de l’idée sympathique de donner l’accès au plus grand nombre à des biens culturels, il faut néanmoins en revenir à quelques principes simples. Les biens gratuits n’existent pas. L’économie de marché permet justement d’attribuer une valeur aux biens et aux services en prenant en compte le principe général de rareté.

Il est étonnant que certains souhaitent élargir la liste des biens dits collectifs au moment où ces derniers sont menacés. En effet, nous prenons conscience que des biens comme l’air, l’eau… ou les autres biens de la nature du fait de leur vulnérabilité ont une valeur.

La gratuité n’existe pas ; ce qui n’est pas payé par l’Internaute doit l’être par un autre. Est-ce au contribuable de payer les artistes ? Faut-il en revenir à la création culturelle d’Etat ? Etonnant paradoxe de la part pour des libéraux qui se battent contre la hausse des prélèvements obligatoires. Comment juger de la valeur d’un bien ou d’un service s’il n’y a plus d’arbitrage par les prix ? Certes, la publicité pourrait suppléer le consommateur mais est-elle gage d’une bonne allocation des ressources ? Ne constate-t-on pas que le téléchargement gratuit a abouti à une remise en cause de la diffusion du nombre d’artistes par les majors de l’édition musicale ? Ne peuvent survivre que ceux qui ont les moyens de remplir les salles de concert et de développer un important merchandising. Les groupes comme les Stones, AC-DC ou U2 ne sont pas touchés par le téléchargement illégal.

Pourquoi se focaliser avec autant de force sur cette histoire de téléchargement quand Internet permet d’avoir accès à des milliers de radios et de services permettant d’écouter à la demande sa chanson préférée ?

Si compte tenu du public visé, le débat s’est concentré sur la musique et la vidéo, la question vaut aussi pour l’information et la littérature.

En vertu de quoi payer un livre, une analyse et toute création intellectuelle ? Leur gratuité signifie que tous les produits de l’esprit se valent tous. Certes, avec la profusion des blogs, tout le monde peut être diffuseur d’informations ? Mais entre un Jacques Attali, un Milan Kundera, une analyse d’un grand journaliste ou d’un économiste et les badinages de certains blogs, il y a une différence.

Si les biens de l’esprit se doivent d’être gratuits, cela signifie que leurs créateurs doivent soit disposer de ressources propres, d’un patrimoine abondant ou de gentils sponsors. Nous en revenons aux règles en vigueur au XVIIIème siècle où les rois finançaient selon leur bon vouloir. Faut-il que les artistes trouvent des mécènes ce qui ne favorisera que ceux qui sont déjà en place ou qui ont des relations ? L’avenir est-il aux chanteurs de la starac ou de la nouvelle star. ? Faut-il lancer une starac pour les écrivains ?

En matière de presse, nous constatons que la gratuité est en train de tuer l’analyse au profit de la diffusion d’informations brutes. La valeur ajoutée des articles baissent au même rythme que les revenus des quotidiens.

Les libéraux qui en appellent à la responsabilité et qui soulignent que la mauvaise appréciation des valeurs peut conduire à des comportements collectifs irrationnels pour se racheter une conscience en viennent à légitimer le vol des œuvres de l’esprit. Quelle est la différence de voler un disque à la FNAC ou de télécharger illégalement le dernier disque des Stones ?

Le mécanisme de sanctions prévu par la loi contre le piratage n’est pas liberticide à preuve du contraire ; il en appelle à la responsabilité de chacun et surtout vise à faire prendre conscience que toute création a un prix. Que certains considèrent que les stars gagnent trop d’argent, cela est un autre débat et nul est interdit de surfer sur myspace pour trouver des artistes en devenir…et qui à terme veulent signer un contrat avec une major.

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