Les limites de la fiscalité comportementale
Depuis une vingtaine d’années, les Gouvernements usent et abusent de la fiscalité pour encadrer le comportement des Français. Les droits sur le tabac et l’alcool sont à l’origine de cette pratique. Si initialement, l’objectif était d’obtenir des recettes fiscales supplémentaires sur des produits fortement consommés comme ce fut le cas auparavant sur le sel, l’augmentation de droits sur l’alcool et le tabac répond désormais à un impératif de santé publique. Cette méthode s’est diffusée à toute une série de produits. Il a été ainsi fixé des surtaxes sur les activités pornographiques au nom de la morale ou des taxes sur les produits alimentaires favorisant l’obésité. Toujours au nom de ce même principe, les Gouvernements ont introduit des taxes pour pénaliser les voitures jugées polluantes à travers un système de bonus /malus et des taxes sur les activités polluantes. Cette méthode permet de légitimer des augmentations fiscales en affirmant qu’elles sont instituées pour le bien des contribuables. La fiscalité écologique avec la fameuse éco-taxe obéit à cette logique. En taxant les camions, les pouvoirs publics voulaient inciter les entreprises à moins recourir aux transports routiers. Par ailleurs, cette taxe devait permettre le financement des infrastructures de transports moins polluants. La fiscalité comportementale se traduit également par la mise en place de niches fiscales. Une niche fiscale vise à orienter le comportement des contribuables en les incitant à investir dans telle ou telle activité, à affecter une partie de ses dépenses dans le bâtiment, dans les économies d’énergie, dans les territoires d’outre-mer, dans le cinéma, dans l’épargne retraite, dans le capital risque, dans les association ou les fondations…
Si sur le papier, cette politique apparait séduisante, il n’en demeure pas moins qu’elle contribue à rendre la politique fiscale peu lisible. La multiplication des dérogations aboutit à un mille-feuille fiscal qui crée de la frustration et de la rancœur. La multiplication des dérogations ne peut aboutir qu’à la montée des revendications. L’éco-taxe en impactant les chauffeurs routiers utilisant les routes nationales ou départementales pénalisent par définition les régions n’ayant pas ou peu d’autoroutes. Les Bretons se sont sentis lésés du fait qu’ils souffrent d’un éloignement géographique et qu’ils n’ont pas d’autoroutes. La fiscalité orientée favorise ceux qui ont les moyens d’en bénéficier et pénalise ceux qui sont moins bien informés ou qui n’ont pas les moyens d’utiliser les possibilités d’’y échapper ou d’opter pour les niches fiscales. La fiscalité d’orientation des comportements entrave la liberté individuelle.
L’impôt a un objectif, financer des dépenses publiques. En lui attribuant plusieurs objectifs, la fiscalité n’en atteint aucun. A vouloir faire de l’impôt, un instrument de politique sociale, un instrument de politique écologique, un instrument de politique économique…, il en résulte une perte d’efficacité. La logique d’une fiscalité efficace, c’est une assiette la plus large possible et l’application de taux faibles avec le nombre plus réduit possible de dérogations. L’éco-taxe marque certainement la limite de la politique de la contrainte fiscale surtout que les contribuables ont le sentiment de payer sans avoir en face les services promis.
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