Projet de loi de finances pour 2014 : des économies en trompe l’oeil

25/09/2013, classé dans

Le projet de loi de finances pour 2014 ou la tentation du jeu de bonneteau

Pas de tricherie sur les hypothèses économiques

Le Ministre de l’Economie a présenté, ce 25 septembre 2013, en Conseil des Ministres, le projet de loi de finances pour 2014. Ce budget est élaboré sur la base d’un taux de croissance de 0,9 %. Ce taux se situe dans la moyenne haute du consensus mais elle n’est pas en soi choquante. Avec une croissance de 0,1 % en 2013, en revanche, l’Etat devrait supporter l’année prochaine quelques moins-values fiscales. L’autre facteur de risque pour l’équilibre ce son budget peut venir d’éventuelles tensions sur les taux d’intérêt. Une remontée d’un point des taux pourrait générer 10 milliards ‘euros de dépenses supplémentaires à terme.

L’objectif du Gouvernement est de ramener l’année prochaine le déficit public à 3,6 % du PIB contre 4,1 % en 2013. La France utilise à plein le délai de grâce de deux ans de la Commission européenne pour passer en deçà des 3 % de déficit.

La dette publique devrait battre un nouveau record à 95,1% du PIB en 2014, avant un reflux l’année suivante. La charge de la dette demeure le premier poste de dépenses de l’Etat (46,7 milliards d’euros).

A cet effet, la dépense publique devrait se situer à 56,7% du PIB contre 57,1% en 2013. Le taux de prélèvements obligatoires s’élèvera à 46,1% du produit intérieur brut (PIB) en 2014.

Des économies en trompe l’œil

Le Gouvernement prévoit d’économiser 15 milliards d’euros en 2014, soit 80% de l’effort de réduction des déficits. Néanmoins, il faut souligner que cette baisse est avant tout une moindre croissance par rapport à l’augmentation naturelle des dépenses publiques. Néanmoins, l’Etat réalisera 1,5 milliard d’euros d’économies net d’économies dans ses dépenses (hors charge de la dette et de pensions. L’assurance maladie réalisera 3 milliards d’économies, soit la moitié de la réduction des dépenses sociales.

Le Gouvernement met en avant que les administrations publiques économiseront 15 milliards d’euros en 2014. Ce serait du jamais vu. 15 milliards d’euros sur un total de dépenses publiques d’environ 1200 milliards d’euros. Ces économies si elles sont avérées représenteraient 1,25 % du total des dépenses publiques françaises, une goutte d’eau dans l’océan de la dette publique qui sera supérieur à 1900 milliards d’euros l’année prochaine.

Et puis, il ne s’agit pas d’économies mais avant tout d’une moindre progression par rapport à la pente naturelle des dépenses publiques. En effet, du fait de l’augmentation du nombre de pensionnés, de l’augmentation des traitements des fonctionnaires au nom de l’ancienneté, les dépenses augmentent sans intervention du Gouvernement.

Il n’en demeure pas moins que les dépenses du budget général passeront de 295 à 305 milliards d’euros de 2013 à 2014 soit une hausse de 10 milliards d’euros.

Pour l’Etat, les économies se chiffreraient à 9 milliards d’euros. Le gel du point de la fonction publique permettra de supprimer, avec quelques autres mesures de gestion des effectifs une dépense automatique, de 1,7 milliard d’euros. Des économies de fonctionnement sont avancées à hauteur de 1 milliard d’euros. C’est le Ministère de la Défense qui est amené à se sacrifier sur l’autel de la rigueur tout comme les services de Bercy.

Attention, les impôts locaux pourraient augmenter

Les collectivités locales sont les autres grandes perdantes du jeu de bonneteau. En effet, 3,3 milliards d’euros d’économies sur un total de 100 milliards d’euros sont réalisées sur les concours aux autres entités (rassemblant essentiellement les dotations aux collectivités locales). Les communes, les départements ou les régions risquent d’augmenter les impôts locaux d’autant plus que l’Etat a accru leurs marges en la matière en relevant les plafonds des droits de mutation.

Les investissements et les dépenses d’intervention de l’Etat subissent également un coup de rabot avec une économie de 2,6 milliards d’euros. C’est assez traditionnel tout en étant très préoccupant.

Les régimes sociaux au pain sec

Les autres économies dépendent non pas de l’Etat mais des régimes sociaux ; or les dépenses sociales sont difficilement maîtrisables et peuvent varier en fonction de l’état de la conjoncture. Le Gouvernement avance 6 milliards d’euros d’économie sur l’assurance-maladie. L’évolution des dépenses d’assurance-maladie serait de + 2,4 % contre + 2,7 % en 2013. A cette fin, le Gouvernement a prévu de baisser le prix de certains médicaments et les tarifs de certaines spécialités. Il attend également des économies sur la gestion du secteur hospitalier ce qui n’est pas gagné.

Autre source d’économies fallacieuse, les retraites ; le Gouvernement met en avant 2 milliards d’euros d’économies qui sont, en fait, un manque à gagner pour les retraités. Ces économies sont issues de la désindexation des retraites complémentaires et du report de l’actualisation des pensions de base du 1er avril a 1er octobre 2013. Les retraités sont d’ailleurs mis à contribution avec la fiscalisation des majorations pour familles nombreuses prévue dans le cadre de la réforme des retraites 2014.

Les contribuables ne sont pas oubliés

Le jeu d’écriture ne saurait masquer que le budget 2014 fait peser sur les contribuables un effort important d’autant plus que le Gouvernement a eu la prudence politique de faire adopter certaines hausses applicables en 2014 il y a un an. Ainsi, le relèvement de la TVA tout comme le plafonnement des niches fiscales sont déjà approuvés. Il faut y ajouter la suppression de la réduction d’impôt pour frais scolaires que néanmoins les députés de la majorité pourraient maintenir. Il faut également noter la suppression de l’exonération fiscale de la participation des employeurs à l’acquisition d’une complémentaire santé qui alourdira d’un milliard d’euros l’impôt sur le revenu. En revanche, le barème de l’impôt sur le revenu sera actualisé tout comme lé décote favorisant les familles les plus modestes.

Les entreprises devraient bénéficier au titre de 2014 de 10 milliards d’euros grâce au crédit d’impôt compétitivité emploi (CICE). Ce crédit d’impôt est, en partie financer par le relèvement du taux normal de TVA de 19,6 à 20% et du taux intermédiaire de 7 à 10%. Le taux réduit baisse de son côté de 5,5 à 5 %. Par ailleurs, les entreprises connaîtront un nouvel impôt avec la taxe sur l’excédent brut d’exploitation.

Epargnant, le PEA mais pas l’assurance-vie

Au niveau des épargnants, il faut souligner que le plafond des niches fiscales sera abaissé à 10 000 euros pour les déclarations effectuées en 2013 mais cela avait été adopté en 2012. Concernant l’assurance-vie, rien de nouveau, le fonds « eurocroissance » et la taxation des contrats de plus de 500 000 euros attendra certainement le projet de loi de finances rectificative.

Le projet de loi de finances prévoit comme cela avait été annoncé la création du PEA PME avec un plafond de 75 000 euros et le relèvement du plafond du PEA de 132 000 à 150 000 euros. Cette mesure favorable aux épargnants qui choisissent les actions devraient faciliter le financement des entreprises françaises sous réserve que l’argent collecté aille bien aux entreprises…

Le budget 2014 est un patchwork de bonnes intentions. Le ministère de l’économie a du tout à la fois du satisfaire Bruxelles, le PS, les entreprises, les revenus modestes… De ce fait, ce budget manque un peu de corps et de direction. Il marque néanmoins une étape dans une maîtrise régulée des dépenses

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