L’avenir est au « silvertourisme »

01/10/2016, classé dans

Maintes fois prédit, toujours attendu, le tourisme des seniors est en plein décollage. Pour s’en convaincre, il suffit, en ce mois de septembre, de prendre les avions et les trains qui relient les grandes villes  aux hauts lieux touristiques ; il suffit de fréquenter les supermarchés des villes balnéaires pour constater que les têtes blanches ont remplacé les familles. Si les jeunes actifs prennent de plus en plus leurs vacances en juin et au début du mois de juillet, les retraités ont choisi le mois de septembre. Après avoir dû gérer leurs petits enfants durant les grandes vacances, ils s’accordent les leurs.

Ce phénomène concerne l’ensemble des États européens. Avec plus de 1,2 milliard de nuitées effectuées au cours de leurs voyages dans le monde entier en 2014, les touristes âgés de 65 ans et plus vivant dans l’Union européenne  ont représenté 20 % de l’activité touristique. De manière générale, les touristes âgés privilégient les séjours domestiques dans leur propre pays qui représentaient les deux tiers (66 %) du total de leurs nuitées (contre 59 % pour l’ensemble des touristes).

 

Si les retraités sont devenus la principale classe d’âge pour le tourisme, leurs dépenses restent, en la matière, inférieures à celles des actifs.  En effet, un touriste âgé dans l’UE a, en 2015, dépensé en moyenne 52,60 euros par jour, soit 12,70 euros de moins que le touriste moyen. Partant moins loin et n’ayant pas de charges de familles, ses dépenses sont de ce fait moins importantes. En outre, partant en demi-saison, il profite de tarifs plus intéressants pour se loger et pour se déplacer.

La France est le pays où la proportion de nuitées réglées par des plus de 65 ans est la plus importante, 25 % (avec Chypre). Cette proportion atteint près de 33 % en prenant les plus de 62 ans. A 85 %, les retraités français choisissent la France comme lieu de villégiature. Le poids important des touristes seniors en France n’est pas sans lien avec le fait que l’âge de départ à la retraite est un des plus faibles de l’OCDE. Or, c’est entre 60 et 70 ans que le nombre de touristes âgés est le plus important.

Par rapport à 2009, le nombre de nuitées touristiques des personnes de plus de 62 ans a progressé de plus de 17 % en 2014. Les seniors remplacent les actifs qui partent moins longtemps en vacances (baisse des nuitées de 9 % sur la même période). La progression rapide des nuitées de la part des seniors est la conséquence de l’arrivée à l’âge de la retraite des premières générations du baby-boom. Disposant de revenus supérieurs à ceux de leurs aînés, étant habitués, depuis de nombreuses années à partir régulièrement en vacances, ils ont conservé cette habitude après avoir cessé de travailler. 75 % des 62-71 ans sont partis en vacances en 2014. Ce taux est encore de 68 % chez les 72-81 ans. Il baisse sensiblement chez les 82-89 ans mais il est encore de 47 %. La mobilité reste donc élevé jusqu’à 80 ans. La durée moyenne des séjours est plus longue chez les retraités que chez les actifs néanmoins, il est à noter qu’après 80 ans, les voyages se raccourcissent. De ce fait, le nombre de nuitées pour les 82 – 89 ans est de 22 millions contre 114 millions pour les 72-81 ans et de 265 millions pour les 62-71 ans.

Les retraités voyagent plus souvent en groupe et ont recours de manière plus importante au système du forfait que les actifs. 30 % des voyages des plus de de 62 ans sont réalisés dans le cadre de forfaits « tout compris » quand ce ratio est de 10 % chez les actifs.

Les retraités passent beaucoup plus de temps que leurs cadets dans leur résidence secondaire pour deux raisons. Premièrement, les résidences secondaires sont avant tout possédées par les plus de 55 ans (20 % des 62-89 ans en disposent d’une) contre 7 % des 25-61 ans) ; par ailleurs, moins contraints par le temps, ils y restent plus longtemps. Plus de 26 % des nuitées de seniors sont réalisées en résidence secondaire contre 7,7 % chez les 25-61 ans. Les plus de 62 ans ont moins recours au camping que leurs cadets mais ils sont d’importants consommateurs d’hôtels et de locations notamment via les plateformes collaborative comme Airbnb.

Les dépenses touristiques des seniors se sont élevées à 22 milliards d’euros en 2014. La dépense moyenne par nuitée est de 56 euros contre 69 euros pour les actifs. Du fait de séjours plus longs et de l’absence de contrainte familiale, les retraités effectuent plus d’activités que les actifs. Ils privilégient les activités culturelles, les visites de sites naturelles, la thalassothérapie, la gastronomie, l’œnologie et les promenades. Parmi les activités les plus pratiquées figurent le bricolage et le jardinage (en liaison avec la maison secondaire).

La montée du tourisme chez les seniors est amenée à se poursuivre voire à s’accélérer dans les prochaines années. En effet, de 2015 à 2025, la population des 72-81 ans augmentera de plus de 10 %, celle de 72-81 ans de plus de 40 %. A comportement identique, le nombre de nuitées touristiques en provenance des seniors augmentera de plus de 71 millions d’ici à 2025, soit une hausse de plus de 17 %. Le surcroit de dépenses attendu est évalué à 4 milliards d’euros. Les larges générations des années 50 remplacent les générations faibles en effectifs des années 30, le chiffre d’affaires du tourisme lié aux séniors pourrait augmenter très rapidement dans les prochaines années. Par ailleurs, la fréquentation touristique des mois de mai, juin, septembre et octobre devrait progresser au point qu’il n’est pas impossible que le terme de basse saison disparaisse. Les retraités dont le niveau de vie est supérieur à celui de l’ensemble de la population risquent de payer plus chères leurs vacances.

La France devrait également capter une partie de la clientèle âgée étrangère. Il y a en la matière un gain potentiel d’une dizaine de millions de nuitées avec à la clef un chiffre d’affaire compris entre 2 et 3 milliards d’euros.

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